Cette magistrale étude appartient à la série de fragments de cadavres que Géricault peignit durant l’hiver 1818-1819 au cours de l’élaboration du Radeau de la Méduse (Salon de 1819, musée du Louvre). Comme on le sait, la Méduse, frégate de la marine royale, fit naufrage le 2 juillet 1816 au large du cap Blanc. Près de cent cinquante personnes, pour l’essentiel des militaires, s’entassèrent sur un radeau de vingt mètres sur sept et dérivèrent pendant quinze jours. Le 17 juillet, le brick Argus apparut et sauva la quinzaine de rescapés. Afin de s’imprégner de l’horreur de ce drame qui obligea certains survivants à se livrer à des scènes de cannibalisme, Géricault fit venir à son atelier certains morceaux d’anatomie vraisemblablement procurés par des carabins de l’hôpital Beaujon, proche de l’atelier : deux jambes vues par les pieds et un bras avec la clavicule, un linge maculé de sang recouvre partiellement l’épaule. Les puissants effets du clair-obscur, la facture large et nourrie, le cadrage rapproché, l’harmonieuse imbrication des formes procurent chez le spectateur une sorte de trouble attirance, mélange de volupté et de répulsion. Stimulé par l’exemple de Michel-Ange, qu’il avait admiré en Italie, et d’Antoine Jean Gros (1771-1835), son contemporain, Géricault parvient avec une « verve peu commune » à régénérer la peinture française en ouvrant directement la voie à la modernité en peinture. C’est ce que proclame magistralement le tableau de Montpellier dont le réalisme funèbre malmène sans retour les canons du beau idéal.
Emplacement
- 32 - Delacroix et l'OrientalismeNuméro d'inventaire
876.3.38
Date
Vers 1817
Type d'oeuvre
PeintureDimensions
Materiaux
peinture à l'huile
Genre
Nature morteThème
- Le corps