Né à Bourges vers 1400, tour à tour homme d’affaires, aventurier, argentier du roi Charles VII, Jacques Coeur doit sa fortune au commerce avec les pays arabes. Armateur en 1445 à Montpellier, ses navires rapportent en France, à Lattes ou à Aigues- Mortes, épices, sucre, coton et soie venus d’Égypte et de Syrie. En disgrâce à partir de 1451, il trouve refuge auprès du pape et meurt à la tête d’une croisade en 1456 sur l’île de Chios. Cette destinée romantique devait logiquement intéresser les sculpteurs d’un xixe siècle épris d’histoire. L’initiative revient à la direction des Beaux-Arts qui, pour venir en aide au sculpteur Auguste Préault en grandes difficultés matérielles après la Commune, lui passe commande d’une oeuvre pour le musée de l’Histoire de France, créé par Louis-Philippe au château de Versailles. Laissé libre de choisir entre les personnages de La Bruyère et de Jacques Coeur, Préault, connu pour son caractère passionné, opte bien entendu pour le célèbre marchand. En 1872, Préault exécute une maquette en terre cuite (Bourges, musée du Berry) où l’essentiel est déjà en place : le drapé abondant, les pièces d’or s’échappant du sac, et l’ancre, motif chrétien (symbole de l’espérance) et marchand. Si l’inspecteur des Beaux-Arts trouve la maquette « hardie et vigoureuse », il relève l’étrangeté de la coiffure. Préault affectionne particulièrement ces figures drapées, que l’on retrouve dans son grand succès, Le Silence (Salon de 1849), médaillon représentant un visage très proche de celui de Jacques Coeur, le doigt sur la bouche. Autorisé à poursuivre son travail, Préault réalise en 1873 la grande version en plâtre de Montpellier, qui porte les traces de crayon et les ergots de mise au point caractéristiques du travail de report sur marbre, et dont la version définitive est présentée au Salon de 1875. La critique accueille très favorablement son oeuvre, comme en témoigne l’appréciation de Castagnary : « Le Jacques Coeur de M. Auguste Préault a une grande allure. Debout, dans le costume pittoresque du xve siècle, l’argentier de Charles VII apparaît de loin comme un bourgeois opulent, qui sait ce qu’il vaut et marche d’un pas décidé dans la vie. À sa droite coule une rivière de pièces d’or, symbole de ses immenses richesses ; derrière lui, une ancre et des flots rappellent ses lointaines entreprises. Cette heureuse statue, où le maître romantique a fait preuve de sagesse autant que d’habileté, est destinée à la ville de Bourges. Il n’y aura pas sur nos places publiques beaucoup de statues originales. » En effet, les édiles de Bourges, qui cherchaient depuis 1841 sans succès à édifier un monument à Jacques Coeur virent leur souhait enfin concrétisé en obtenant le dépôt du marbre, tandis que la ville de Montpellier obtenait en 1879 le dépôt du plâtre, si bien que l’oeuvre ne rejoignit jamais le château de Versailles à laquelle elle était destinée. Enfin, dans les années 2000, la Ville de Montpellier commanda aux ateliers de la Réunion des musées nationaux un tirage en bronze. Fondue d’après le marbre de Bourges, cette nouvelle sculpture trône désormais devant les halles Jacques-Coeur.
Emplacement
- 30 - Salle PréaultNuméro d'inventaire
D879.1.4
Date
1873
Type d'oeuvre
SculptureDimensions
Thème
- Allégories et symboles
- Voyage