La Guérison du démoniaque

Superbe exemple de l’idéal classique de Sébastien Bourdon au lendemain de son séjour à la cour de Christine de Suède et avant le séjour à Montpellier en 1657. L’artiste, fin connaisseur de la Bible, emprunte son sujet à un passage, peu souvent abordé par les peintres, de l’Évangile de Luc (8, 26-39) : le Christ, pivot central de la composition, chasse d’un geste autoritaire de la main les esprits malins qui habitaient le démoniaque, et les loge dans des pourceaux qui se jettent dans la mer. Les trois apôtres à droite, rigoureusement campés dans l’espace, expriment par la déclinaison systématique de leur tête et de leurs bras l’émoi de la foule qui assiste au miracle. La composition tout abstraite, à l’aide d’orthogonales puissantes, enferme les figures et les éléments du décor dans un rigoureux canevas géométrique égayé ici et là par des taches de couleurs sonores : bleu, rouge, jaune. La maîtrise de l’espace comme la rhétorique des passions sont des emprunts directs à l’art de Raphaël (cartons des Actes des Apôtres, Londres, Victoria and Albert Museum) et de Poussin (1594- 1665). Mais ce ralliement enthousiaste à un classicisme exigeant n’exclut pas l’expression d’une sensibilité personnelle pour la couleur, pleine de raffinements poétiques, et surtout pour le paysage empreint ici de réminiscences vénitiennes et carrachesques. Le musée a acquis en 2015 une esquisse du tableau avec variantes dans la position des figures et des fabriques animant le paysage.