Cette terre cuite est la maquette que Legros soumit en 1695 au jugement du père Andrea Pozzo (1642- 1709) qui lui donna la commande prestigieuse d’un des deux grands groupes de marbre encadrant l’autel du transept dédié à saint Ignace dans l’église du Gesù à Rome. Arrivé en 1690 à Rome à l’Académie de France comme pensionnaire, le Français Legros est le fils d’un des sculpteurs de Versailles, Pierre I Legros (1629-1714). C’est secrètement qu’il participe au concours du Gesù : le règlement interdit en effet que les élèves travaillent pour l’extérieur sans l’autorisation du directeur, Matthieu de La Teulière, à la tête de l’Académie de 1684 à 1699. Sa réussite gêna celui-ci, à la fois flatté et mécontent de cet exemple d’indiscipline. Finalement, Legros quitta l’Académie pour pouvoir sculpter son marbre. Un autre Français, Jean-Baptiste Théodon (1645-1713), obtint la commande de l’autre groupe, celui de gauche, La Religion terrassant l’Idolâtrie. Le marbre de Legros représente la Religion tenant la Croix et les Évangiles, debout, menaçant d’un foudre les allégories du Vice, un homme avec le serpent du Mal qu’elle renverse de son pied, et de l’Hérésie, une vielle femme échevelée. Un ange déchire un livre de Ulrich Zwingli, tandis qu’un ouvrage de Martin Luther et un autre de Jean Calvin sont visibles sous le corps du Vice : saint Ignace et les Jésuites avaient lutté contre le protestantisme symbolisé par ces trois grandes personnalités de la Réforme. La maquette de Montpellier présente quelques différences : certaines résultent probablement de disparitions (le foudre, la Croix), d’autres, comme le serpent et les livres de Calvin et Luther, n’avaient apparemment pas encore été prévues. Très influencé par Bernin (1598-1680), Legros conçoit une oeuvre mouvementée, organisée suivant une diagonale qui part d’en haut à gauche et du fond vers l’avant. De même, la terre cuite a cette souplesse qui donne du moelleux aux drapés agités. Ce coup de maître de l’artiste encore jeune sera suivi par sa réussite en 1697 au concours pour la statue en argent de saint Ignace destinée au même autel. Cette terre cuite donnée par Bonnet-Mel (1795-1864) a probablement appartenu au grand collectionneur Pierre Crozat (1665-1740) et a été exposée en 1784 au Salon de la Société des beaux-arts de Montpellier.
Emplacement
- 18 - Galerie des ColonnesNuméro d'inventaire
864.2.38
Date
1695
Type d'oeuvre
SculptureDimensions
Genre
HistoireThème
- Iconographie religieuse