Le Mariage mystique de sainte Catherine

Ce superbe tableau compte parmi les oeuvres les plus attachantes du musée. Le thème, très en vogue à la Renaissance, met en scène une figure purement légendaire dont l’histoire a été rapportée d’Égypte par les croisés : Catherine, fille du roi Costius, était renommée pour sa beauté et sa science. Pour avoir refusé de sacrifier aux idoles, elle fut condamnée une première fois au supplice de la roue, sauvée par le Christ et finalement décapitée. La composition dérive des « conversations sacrées » de Titien (vers 1488-1576) : d’un côté, la Vierge bienveillante et attentive est assise devant un puissant soubassement classique vu de biais ; de l’autre, Catherine, éclatante de jeunesse et de pureté, parée d’un lourd manteau de brocart noir et or qui rappelle ses origines royales, est agenouillée tout près du rebord de la toile. L’Enfant Jésus se penche vers elle avec une expression de douceur ineffable et lui remet l’anneau symbolique du mariage en témoignage de sa foi héroïque. La richesse des textures, l’éclat des carnations, le modelé délicat donnent l’illusion d’une réalité immédiate, tandis que la lumière irréelle ramène le spectateur dans la sphère plus abstraite du rêve et du sacré. Parmi les nombreux tableaux de même sujet peints par Véronèse (Londres, Hampton Court ; Venise, Gallerie dell’Accademia ; Venise, église San Sebastiano), la version de Montpellier appartient à la phase juvénile de l’artiste, vers 1557-1565 – soit après son installation définitive à Venise –, et offre de nombreuses affinités stylistiques avec un ensemble de Sainte Famille datant de la même période. Le tableau, diminué dans sa partie haute, provient de la célèbre collection du marquis Gerini de Florence où Fabre en fait l’acquisition. Frédéric Bazille (1841-1870) copia le tableau du musée Fabre en 1864. Après la mort du peintre, son père Gaston Bazille offrit le tableau à l’église de Beaune-la- Rolande, en remerciement de l’aide que le prêtre lui avait apportée pour retrouver le corps de son fils bien-aimé