La Nature morte au héron symbolise l’amitié entre les futurs impressionnistes, de 1865 à 1870. En 1867, Frédéric Bazille entreprend dans l’atelier de la rue Visconti à Paris, qu’il partage avec Auguste Renoir, la peinture d’un héron. Renoir nous a laissé l’image du Montpelliérain (Paris, musée d’Orsay, dépôt au musée Fabre), le grand corps tassé devant le chevalet, en train de peindre son tableau non loin d’un paysage de Claude Monet accroché au mur. Au même moment, Alfred Sisley, autre camarade rencontré à l’atelier de Charles Gleyre, s’intéresse au même motif dans un tableau également conservé au musée Fabre : un héron cendré suspendu par les pattes à une robuste table de bois, qui occupe avec ses ailes déployées toute la largeur de la toile. Derrière lui, la crosse d’un fusil et probablement une gibecière ; devant lui, disposés sur une pièce de tissu blanc, à même le sol, des geais des chênes et une pie bavarde. À la différence de Bazille, Sisley a réduit l’importance du décor en resserrant son attention sur les animaux vus en cadrage rapproché. Les deux artistes, unis par des liens d’amitié et un même engagement pour la Nouvelle Peinture, rendent, chacun à leur manière, un hommage non déguisé à Édouard Manet dont les natures mortes des années 1864-1865 ont orienté leurs recherches, non seulement par le choix des thèmes mais aussi par le style. Ici, un pinceau souple, fluide et économe, s’attache à rendre avec objectivité la surface des choses. L’attention du spectateur se porte d’emblée sur la touche à la fois expressive et raffinée. La palette extrêmement réduite – autre emprunt au grand aîné – joue habilement sur des oppositions de gris bleuté, de blanc éclatant, de noir et de beige. Seule dans le plumage des geais s’insinue imperceptiblement une note de couleur, rose et bleue. Outre l’exemple de Manet, Bazille se montre sensible également à la leçon des grands maîtres français du xviiie siècle – Jean-Baptiste Oudry, Jean Siméon Chardin – qui suscitent au même moment un regain d’intérêt et de curiosité. Gaston Bazille, grand amateur de chasse à la macreuse, s’approprie le tableau contre le gré de son fils, lors d’un passage à Paris. « La toile, écrivait- il à sa femme le 23 décembre 1868, est un peu plus haute que large et pourra se mettre entre les deux fenêtres de mon cabinet si le jour y est suffisant. »
Emplacement
- 39 - Salle BazilleNuméro d'inventaire
898.5.2
Date
1867
Type d'oeuvre
PeintureDimensions
Materiaux
peinture à l'huile
Genre
Nature morteThème
- Animaux