Paysage de Lozère (Vareilles)

C’est en novembre 1887 que Monfreid rencontre Paul Gauguin : d’emblée, il reconnaît en lui un « maître » et se montre « fortement déconcerté par les données d’art émanant de ses oeuvres, aussi bien que des conversations de cet homme extraordinaire ». Dans les années suivantes, l’influence de Gauguin ne va pas tarder à se faire ressentir dans sa peinture, comme en témoigne le Paysage de Lozère (Vareilles) acquis par le musée en 2017. Au début des années 1890, Monfreid, brouillé avec sa mère, délaisse le Conflent et la propriété de Saint-Clément, et se rend à plusieurs reprises en Lozère qui lui inspire la Vue de Saint-Chély-d’Apcher (1890, collection particulière) ainsi que Les Pins, dits Paysage au Malzieu (1893, collection particulière). Durant l’été 1891, il représente le hameau de Vareilles, situé sur la commune de Saint-Pierre-le- Vieux, à près de mille mètres d’altitude : une petite maison au toit de lauzes dont le faîte est incurvé borde un chemin qui serpente dans un plateau vallonné ; à gauche, une croix blanche ferme la composition tandis qu’une petite paysanne s’engage, solitaire, sur cette route sinueuse. Il se dégage de la toile un sentiment de paix, de joie primitive qui rapproche ce coin perdu de la Margeride de la Bretagne aimée par Gauguin. La conception rythmique de l’espace, la palette arbitraire des couleurs (rose, bleu ciel, mauve, vert tendre), l’opposition des textures jouant sur des formes plates et cernées ou au contraire fortement hachurées, la silhouette aplatie de la fillette rappellent Gauguin et ses paysages bretons de quelques années antérieurs. On sait que Monfreid, pour venir en aide à son ami en partance pour Tahiti, s’était porté acquéreur à la vente de l’hôtel Drouot du 23 février 1891 de deux paysages, Les Meules jaunes (1889, Paris, musée d’Orsay) et La Barrière (1889, Zurich, Kunsthaus), qui ne sont pas sans évoquer le tableau du musée Fabre.