Si la peinture néoclassique se caractérise par un retour aux modèles de l’Antiquité, les artistes continuent également de fréquenter des sujets issus d’autres traditions. C’est notamment le cas de Vincent avec Renaud et Armide, qui s’inspire du vaste poème La Jérusalem délivrée (1581) de l’écrivain italien de la Renaissance Torquato Tasso (1544-1595), surnommé le Tasse. Cette épopée, qui raconte la rivalité entre les chevaliers chrétiens et les guerriers musulmans durant la première croisade, tout en y intégrant des intrigues amoureuses et courtoises, connut un immense succès européen et fut largement illustrée par les artistes. Bien qu’ennemis, le chevalier franc Renaud et la magicienne Armide tombent amoureux. Dans le tableau de Vincent, Armide défaille après avoir avoué ses sentiments à son rival, dessinant une élégante dynamique, alors que Renaud se précipite pour la retenir. La scène se déroule dans une nature dense, où des palmiers apportent une pointe d’exotisme. L’artiste s’applique particulièrement dans les beaux détails des accessoires raffinés : l’armure ciselée et brillante, l’épée sertie de bijoux de Renaud, le casque doré orné d’une sphinge persane, la rondache ottomane, le précieux carquois d’Armide. Le rouge vif et le bleu turquoise des drapés renforcent cette élégante sophistication. À peine visibles, les compagnons d’armes de Renaud, cachés derrière les troncs à droite, suggèrent que cette idylle sera d’une courte durée. C’est au Salon de 1787 que Vincent présenta la première version, aujourd’hui perdue, de sa composition commandée par le comte d’Artois, frère de Louis XVI et futur Charles X, et dont Les Amours de Pâris et Hélène de David (1788, musée du Louvre) seront le pendant. Les deux tableaux affirmaient le triomphe de l’amour sur les armes. À cette seconde version, peinte par la suite, Vincent offrit un autre pendant de sa propre composition, Arria et Paetus (marché de l’art), illustrant cette fois le suicide courageux d’un couple de Romains condamnés à mort par l’empereur Claude. Autant à l’aise dans la sévérité antique que dans le merveilleux médiéval, Vincent démontrait l’ampleur de son imagination tout en anticipant le goût troubadour et la passion pour le Moyen Âge et l’Orient qui traversèrent tout le xixe siècle.
Emplacement
- 21 - Salle DavidNuméro d'inventaire
2014.5.1
Date
Vers 1787
Type d'oeuvre
PeintureDimensions
Materiaux
peinture à l'huile
Genre
HistoireThème
- Femme, féminin, féminité
- Mythologie